Si vous avez déjà eu besoin de vous remettre d’une blessure sportive, vous avez probablement utilisé de la glace pour réduire la douleur et l’enflure. Depuis des décennies, les médecins et les entraîneurs sportifs recommandent la méthode RGCE, « repos, glace, compression et élévation », pour réduire la douleur et l’inflammation des entorses aux chevilles. L’inflammation a été considérée comme l’ennemi du rétablissement.
Et si ce n’est pas tout à fait vrai ? Qu’arrive-t-il si l’inflammation est une indication de rétablissement et que l’application d’une glace et les autres « cryothérapies » à base de froid ne font que retarder la guérison ?
Une affirmation sans résultat solide
Il s’avère que l’application de la glace est comme l’utilisation de la soie dentaire : une pratique enracinée qui semble pratique, mais qui n’est pas corroborée par des preuves cliniques. Les plus anciennes justifications de l’application de glace, datant des années 1970, ont perdu tout fondement sous surveillance scientifique, selon certains chercheurs en cryothérapie, et la plupart des études scientifiques sur cette pratique n’ont pas fourni les résultats solides qui auraient justifié sa popularité. C’est le cas, tant pour l’application de la glace dans le cadre de la récupération quotidienne et pour une blessure.
Des études publiés réfutant l’hypothèse de mettre une glace sur les blessures
Une méta-analyse publiée en 2008 dans le Journal Européen des Urgences, qui a examiné de multiples études sur l’effet de la cryothérapie sur les lésions aiguës des tissus mous, a conclu qu’il n’y a pas suffisamment de preuves pour suggérer que la cryothérapie améliore les résultats cliniques dans le traitement des lésions des tissus mous.
De même, un article publié en 2012 dans le « Journal of Athletic Training », qui a passé en revue de multiples études évaluées par des pairs, a noté que la pratique consistant à utiliser de la glace pour traiter les chevilles foulées « est basée en grande partie sur des preuves anecdotiques » et que « les preuves d’essais contrôlés randomisés pour appuyer l’utilisation de la glace dans le traitement des entorses aiguës de cheville sont limitées ».
De plus, selon ces articles et les experts en cryothérapie, les études qui ont montré des résultats positifs sur l’utilisation de la glace ont souvent souffert de lacunes telles que la petite taille des échantillons, des mesures non pertinentes et des résultats statistiquement insignifiants. Même le médecin qui a inventé la méthode RGCE n’en fait plus la promotion.
Les confirmations des experts
Voici les propos de Gabe Mirkin, professeur et ancien coureur de marathon à ce sujet : « C’est tout à fait bien de mettre de la glace si vous voulez, mais réalisez que cela retarde la guérison. Le fait de mettre de la glace sur une blessure ne changera rien à long terme. Au lieu d’appliquer de la glace pour réduire l’inflammation, les athlètes feraient peut-être mieux de la laisser suivre son cours. Mieux encore, il est plus judicieux de se remettre en marche. L’important c’est de ne pas augmenter la douleur, mais de bouger dès que possible. »
L’athlète et journaliste Christie Aschwanden trouve un peu de justification dans la recherche. Malgré son expérience de cycliste championne et de skieuse de fond professionnelle, l’utilisation de la glace, que ce soit pour se remettre d’un entraînement intensif ou d’une cheville roulée, ne lui a jamais plu. Elle a tenté l’expérience à maintes reprises, mais a toujours trouvé que c’était trop douloureux pour être efficace, pensant que l’inconfort et le désagrément ont annulé tous les avantages qu’il y avait. Après avoir fait des recherches sur la question, elle soutient qu’il n’y a probablement pas eu d’avantages.
Aujourd’hui, Aschwanden est un aussi un écrivain scientifique. Dans un chapitre de son nouveau livre sur la science du rétablissement dans le sport, elle a examiné les glaçons, les bains et les massages et a conclu que ces cryothérapies ne sont pas une pratique fondée sur des preuves, en ce sens qu’elles se sont avérées utiles.
Les experts qu’elle cite dans son livre croient que les justifications données pour l’utilisation de la glace en vue de réduire l’enflure et l’inflammation ne manquent pas seulement de preuves mais pourraient être contre-productives. Selon Aschwanden, cette idée selon laquelle l’inflammation est nocive et qu’il faut la réduire n’est pas justifiée. Le processus inflammatoire est la façon dont le corps se remet de l’exercice, se reconstruit et se rétablit.
Les effets négatives de l’application de la glace sur la régénération
Immédiatement après une lésion tissulaire, les cellules envoient un signal de détresse chimique auquel répondent plusieurs types de globules blancs, qui arrivent sur les lieux et déclenchent une inflammation lorsqu’ils attaquent les agents pathogènes, nettoient et réparent les cellules endommagées.
« Si l’application de la glace dure trop longtemps, cela peut avoir un effet négatif sur la régénération », a déclaré James Tidball, un professeur à l’Université de Californie qui a étudié le rôle du système immunitaire dans les lésions musculaires. En d’autres termes, en utilisant de la glace pour tenter de réduire l’inflammation, qui est la réponse du système immunitaire aux blessures, vous pourriez également réduire l’activité des cellules qui favorisent la réparation.
L’application de glace, un procédé commun à tous les sportifs
Cela ne veut pas dire que la cryothérapie n’a aucun effet physiologique. Le fait de mettre de la glace pour engourdir quelque chose fonctionne sans aucun doute, et il s’agit bien du remède contre la douleur le plus rapide, le plus sûr et le plus simple, à la portée de tous.
La glace peut aussi aider les gens à remettre en mouvement une zone endommagée. « Si vous avez une blessure, les muscles qui l’entourent s’éteignent, ce qui limite la mobilité. Et la glace aide à remettre les muscles en marche » a déclaré Chris Bleakley, un professeur de physiothérapie qui s’est penché sur l’efficacité de la glace sur les blessures sportives.
Certains experts et organismes de recherche qui reconnaissent le manque de données de haute qualité à l’appui de la glace soutiennent néanmoins que c’est un outil important pour les athlètes. Ils soulignent que le manque de preuves va dans les deux sens. « D’un côté, nous n’avons pas suffisamment de preuve que cette pratique fonctionne, mais d’une autre côté, nous n’avons pas non plus beaucoup de preuves que la glace ne fonctionne pas.
A l’heure actuelle donc, il demeure une vision incomplète sur l’efficacité de cette pratique qui limite la possibilité de tirer des conclusions.
L’absence de confirmation scientifique
Bien qu’elle soit en faveur de pratiques fondées sur des preuves, Aschwanden ne volera pas les sacs de glace des gens et ne les tirera pas des bains de glace. Selon elle, même si une méthode de récupération particulière n’est pas cliniquement prouvée, le fait qu’une personne y croie fermement peut renforcer l’effet placebo, ce qui aide au rétablissement. Les gens ont en effet leurs expériences personnelles et celles-ci peuvent être très convaincantes.
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